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Présentation de la société
Les littératures de l'ere coloniale
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AVANT-PROPOS des
Cahiers du Sielec n°2
[1/8]
Nudité et Sauvagerie – Fantasmes
coloniaux
INTRODUCTION SOUS FORME D'HOMMAGE A APHRA
BEHN
par Michel Naumann
« C'étaient les plus beaux hommes
et les plus belles femmes que, jusque-là, ils avaient rencontrés... ( Colon, 16/12/
1492) Je ne crois pas qu'au monde il y ait meilleurs hommes, pas
plus qu'il n’y a meilleures terres. » (Colon, 25/12/1492) Colon prend
le parti d'admirer les Amérindiens qui s'avancent en confiance vers lui et
glisse de la beauté des corps à celle des âmes et des terres découvertes. Ce
lien nous permet probablement de comprendre comment de cette rencontre
émerveillée nous sommes passés aux ethnocides et à l'exploitation sans frein
jusqu'au cauchemar de Saartje Baartman, la « Vénus hottentote », victime des
fantasmes coloniaux les plus dégradants, exposée au Musée de l'Homme jusqu'en
1974, encagée à Picadilly à 16 ans, réduite à la prostitution, morte à 26 ans,
dans la misère, à Paris.
La
conversion s’annonce aisée : « Ils aiment leur prochain comme eux-mêmes. » (Colon, 25/12/1492) Ils donnent sans compter et affichent ainsi
une impardonnable naïveté. Le philosophe mexicain Leopoldo Zea sut fort bien
mettre en évidence que le jardin d’Eden, pour fascinant qu’il soit, implique
une vie sous tutelle. En chassant l'homme nu du Paradis naturel et originel,
Dieu lui offre en réalité une promotion : nous, Occidentaux, sommes entrés dans
l'Histoire que désormais nous faisons, nous sommes ainsi devenus responsables
du monde et des peuples-enfants. Leur sort est clair, ne nous rappellent-ils
pas les païens que nous fûmes mais qui devinrent chrétiens : « On aurait cru voir ces splendides naïades ou
ces nymphes des fontaines tant célébrées par l'Antiquité » (Pierre Martyr, I, 5) Pourvu qu’on
«leur enseigne à aller vêtus... (Colon, 16/12/1492) vos
Altesses doivent avoir grand joie parce que bientôt Elles en auront fait des
chrétiens. » (Colon, 24/12/1492). Fantasmer, c'est
imaginer des situations où le principe de plaisir se passe du principe de
réalité, où s’évanouissent les interdits, où un pouvoir absolu nous est donné.
Or voici que ces peuples nus faciles à conquérir laissent entrevoir un certain
accomplissement de ces rêves fous qui deviennent paradoxalement un devoir assigné
aux maîtres et un progrès pour leurs sujets.
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