AVANT-PROPOS des
Cahiers du Sielec n°3
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Faits religieux et résistances culturelles dans les
littératures de l’ère coloniale
Par ailleurs, les métropoles viennent elles aussi ajouter
des notes discordantes, car elles tiennent compte des temps qu'elles
traversent et parce que leurs politiques d'évangélisation ne sont
pas les mêmes, suivant que l'on est catholique ou protestant,
anglophone, lusophone ou francophone. Leur sort n'est que
difficilement dissociable des stratégies de colonisation. Enfin, dans leur
effort d'adaptation, elles se verront souvent contraintes de
transformer leur message, quitte à le désavouer partiellement ou à y renoncer,
ce que Mongo Beti a particulièrement bien montré dans Le pauvre christ de Bomba. C'est pourquoi ce livre a opté pour
une répartition des communications en parties qui tentent, à leur façon, de
rendre compte de l'extrême diversité des situations culturelles, de ce foisonnement complexe qui s'étend de l'Afrique du Nord et de l'Islam
saharien à l'Afrique de l'Ouest et à Madagascar, et enfin
du monde anglophone à certains aspects plus spécifiques de la question. Ce
livre est dès lors une sorte de voyage dans ce fascinant enchevêtrement d'idéologies
contrastées dont témoignent les récits de l'ère coloniale.
De toutes parts et sur tous les continents, on peut
relever
une reprise d'initiative de la part des pouvoirs coloniaux en place
face à la
menace que représentent pour eux les religions endogènes
(articles d' Alioune
Sow, de Cheikh M. S. Diop, de Gérard Chalaye, de Rosalia
Bivona). Le
fétichisme est souvent au coeur de la résistance
(Romain Mekodiomba), alors
même qu'il peut se prêter par-fois à des
constructions religieuses
inattendues (Jean Arrouye). La complexité des situations n'est
pas sans
provoquer des ambiguïtés (comme le montre Richard Samin
dans son article sur
Ntsikana). Des mouvements syncrétistes et millénaristes
apparaissent (Jean
Sévry) qui sont autant de réponses à une greffe
culturelle difficile. Ainsi,
partout, à Java (Brigitte Legrand) comme à Madagascar
(Dominique Ranaivoson) ou
au Cameroun (Richard Omgba) chacune de ce sculture
ss'efforce d'affirmer malgré tout sa place dans une
histoire qui la contrarie.